« Notre mission, c’est de donner confiance aux personnes qu’on accompagne » – Aude de Gouville, fondatrice et directrice de Tous Au Web
Ce témoignage de l’association Tous Au Web a été recueilli dans le cadre d’un partenariat avec la Région Île-De-France.
Selon la dernière édition du Baromètre du Numérique, 18% des Français manquent encore des compétences pour utiliser internet et les outils numériques. Alors que le numérique occupe une place toujours croissante dans notre quotidien, le tissu associatif représente un maillon essentiel de l’accompagnement des citoyens vers les outils numériques.
A Bagneux, dans les Hauts-de-Seine, l’association Tous Au Web offre depuis 2015 des formations au numérique. Rapidement, ses activités se diversifient et incluent des cours à domicile, des ateliers collectifs, de l’aide individualisée ou encore des permanences numériques dans ses locaux et ceux de ses partenaires.
C’est dans le cadre de ses ressources dédiées aux démarches en ligne que WeTechCare s’est entretenue avec Aude de Gouville, la fondatrice et directrice de l’association.
Les Bons Clics : Comment est née l’association Tous Au Web ?
Aude de Gouville : C’est grâce à ma grand-mère que j’ai monté Tous Au Web. Elle s’est mise à internet à 99 ans quand même ! Elle ne pouvait plus sortir de chez elle et voulait voir les photos des enfants, donc je lui ai offert une tablette – c’est plus simple d’utilisation – et je lui ai expliquée. Ca l’amusait, et elle m’a dit que j’expliquais bien, que je devrais donner des cours. Comme quoi, il n’y pas d’âge pour s’y mettre, il suffit d’être un peu motivé.
J’ai créé l’association en 2015 avec ma fille, et j’ai commencé à donner des cours à domicile. Ensuite, je suis très vite rentrée dans les écoles pour faire des ateliers numériques : on a fait des journaux web, des articles de blog, des jeux de société, des vidéos en stop motion ou encore un geocaching.
Les Bons Clics : Quelles sont vos activités principales ?
Aude de Gouville : Aujourd’hui, les cours à domicile ne sont plus notre cœur de métier. Notre mission est plutôt d’accueillir des personnes dans notre local pour des cours thématiques : un pour les débutants, un autre pour apprendre à gérer internet et une boîte mail de façon sécurisée, et un dernier pour s’initier à la bureautique. Ces cours se divisent en cinq ou six séances d’une heure et demie, pour un total de 20€ à 30€ la formation, selon le nombre de séances.
Nous organisons aussi des travaux pratiques pour des demandes particulières, comme quelqu’un qui souhaiterait vendre un bien par exemple. Ils s’étalent sur quatre séances d’une heure, pour 20€ également.
On aide beaucoup sur les démarches en ligne également. Nous avons des permanences au centre social, à la maison de la justice et du droit. Nous avons ouvert cette année une permanence dans notre local, une autre dans une maison de quartier, ou encore au Tribunal de Nanterre.
En comptant les mois de fermeture avec le COVID, nous avons fait 240 permanences de 3 heures en 2020. On reçoit une personne toutes les demi-heures ou tous les trois quarts d’heure, selon les dossiers. Les dossiers de retraite, par exemple, ça dure près d’une heure, mais il y a de tout.
Les démarches administratives sont de plus en plus dématérialisées et le besoin d’accompagnement augmente énormément.
Et nous intervenons dans les écoles, non seulement pour des ateliers web, mais aussi pour faire de la prévention. Je me suis rendue compte dans mes ateliers périscolaires que le numérique leur posait problème : il leur manque des compétences de base, et n’ont aucune notion des risques qu’ils encourent sur internet. C’est devenu une grosse partie de notre activité.
Les Bons Clics : Quels freins avez-vous rencontré dans le développement de votre association ?
Aude de Gouville : Le plus dur, c’est de se créer un réseau, comme partout. Et bon an mal an, l’association a commencé à être connue et reconnue. Aujourd’hui, le bouche-à-oreille marche bien, la préfecture nous connaît, nous avons beaucoup de partenaires qui nous sollicitent, et c’est devenu plus simple d’obtenir des subventions.
Dans certains cas, c’est l’école municipale des sports de Bagneux qui nous a contactés pour animer des ateliers de prévention web. Le centre municipal de santé nous a aussi sollicités sur la prévention pour un forum dédié, et nous a redirigés vers le foyer de travailleurs migrants également.
J’aime beaucoup travailler avec les partenaires. Cela nous permet de profiter des compétences d’experts, qu’ils viennent des archives municipales ou de la Croix Rouge.
Les Bons Clics : Comment ce réseau vous a-t-il permis de vous équiper ?
Aude de Gouville : Fin 2019, la mairie nous a prêté un local, qu’on a ouvert en février 2020 et – forcément – fermé en mars (rires). On y est installés depuis janvier, et le prêt durera environ quatre ans : on doit seulement payer l’eau et l’électricité.
Côté matériel, nous avons acheté neuf ordinateurs, un grand écran numérique interactif, et nous continuons à investir.
Nous nous agrandissons rapidement, et nos cours sont pleins à chaque fois. Nous avons 3 salariés maintenant, contre un en début d’année. 13 bénévoles nous accompagnent.
Les Bons Clics : Qu’est-ce ce qui fait, selon vous, un bon médiateur ou une bonne médiatrice numérique ?
Aude de Gouville : Dans ce genre de démarche, il faut d’abord être patient, mais il faut aussi être curieux, avoir envie d’aller chercher des choses. Notre mission, c’est plutôt de donner confiance aux personnes qu’on accompagne : elles ne sont pas loin d’y arriver, mais elles n’osent pas.
Il y a forcément des barrières techniques, mais si on n’a pas envie, si on a peur, si on ne connaît pas, il faut leur répondre que ce n’est pas si dur, qu’on y arrive. Pour qu’elles soient autonome avec le numérique, il faut qu’elles aient confiance en elles.