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E-parentalité : les réseaux sociaux et le cyberharcèlement

Dans une ère où les écrans sont omniprésents, les réseaux sociaux occupent une place essentielle en tant qu’espace d’échange, de divertissement, et source d’information pour les jeunes, mais constitue également un terrain propice au cyberharcèlement. En France, une réalité préoccupante émerge : 83% des parents avouent ne pas connaître précisément les activités en ligne de leur progéniture (Enquête de l’institut Audirep sur le cyber-harcèlement des jeunes 2021). Face à ce chiffre et à l’ampleur des cas de harcèlement en ligne, une prise de conscience des risques inhérents à ces plateformes sociales ainsi qu’une connaissance approfondie de celles-ci s’imposent pour protéger les plus vulnérables.

Approfondir ses connaissances des réseaux sociaux et protéger ses données personnelles

Une récente enquête de l’agence Born Social révèle que 87% des moins de 13 ans utilisent régulièrement un réseau social, malgré l’interdiction officielle qui les empêche d’y accéder avant cet âge. Cette réalité interpelle et soulève des préoccupations quant à la sécurité et la protection de la vie privée des enfants.

D’autre part, 75% des adolescents âgés de 15 à 18 ans communiquent avec des inconnus sur les réseaux sociaux (Génération numérique, 2021). Cette propension à interagir avec des personnes qui leur sont étrangères met en évidence les risques potentiels auxquels les jeunes sont exposés, notamment en matière d’exploitation de données, de contenus inappropriés, de vol d’identité ou encore de cyberintimidation.

Face à ces défis, plusieurs pays ont mis en place un concept de majorité numérique. Fixée à 15 ans en France, elle constitue un seuil où les adolescents acquièrent une autonomie légale dans la gestion de leurs données personnelles en ligne. Jusqu’à cet âge, la responsabilité de la protection des données personnelles des enfants incombe principalement aux parents. Conscient de l’importance de cette question, un projet de loi est actuellement en discussion pour rendre obligatoire la vérification de la majorité numérique sur les plateformes de réseaux sociaux.

“Énormément d’enfants sont déjà sur des réseaux sociaux sans forcément avoir conscience de ce à quoi ils s’exposent et de ce qu’ils partagent.”

Axelle Desaint, Directrice du pôle éducation au numérique et du programme national “Internet Sans Crainte” chez TRALALERE

Afin de mieux appréhender les enjeux liés à l’utilisation des réseaux sociaux par les jeunes  et d’identifier leurs préoccupations quant à leur sécurité en ligne, l’association Génération Numérique a mené une enquête sur les pratiques numériques des 11-18 ans. Cette enquête réalisée en février 2022 révèle que la principale crainte pour 41% d’entre eux est d’être victime de cyberharcèlement, suivi de près par la peur du vol de données personnelles, avec 32%. Ces chiffres témoignent de l’importance d’approfondir notre compréhension des médias sociaux et du phénomène de cyberharcèlement, de manière à sensibiliser et protéger les jeunes utilisateurs d’Internet.

Qu’est ce le cyberharcèlement ?

Le cyberharcèlement se définit comme des violences répétées utilisant les moyens de communication numériques pour porter atteinte à l’intégrité morale d’une personne qui ne peut facilement se défendre seule. Cette forme de harcèlement se caractérise par plusieurs éléments qui le distinguent du harcèlement traditionnel. Tout d’abord, l’anonymat offert par les plateformes en ligne permet aux agresseurs de dissimuler leur identité créant ainsi un déséquilibre des forces. L’envergure de l’humiliation est également amplifiée sur Internet par le partage massif et permanent. Enfin, le manque de contrôle sur la diffusion de l’information et le caractère omniprésent du cyberharcèlement accentuent les effets néfastes sur la victime.

Le cyberharcèlement peut prendre différentes formes, allant des intimidations, insultes et moqueries, aux chantages, menaces et à l’incitation au suicide. Il peut également inclure la propagation de rumeurs, le piratage de compte et l’usurpation d’identité. Par ailleurs, des pratiques de plus en plus répandues telles que la création de pages, de sujets de discussion ou de groupes visant à nuire à une personne (compte Fisha), ainsi que la publication de photos ou de vidéos dénudées ou sexuelles de la victime (revenge porn), sont également des manifestations de cette forme d’harcèlement. Les motivations derrière le cyberharcèlement peuvent varier, l’intention de nuire à l’image et à la réputation de la victime, ou la recherche de popularité en se mettant en avant aux dépens des autres sont les causes les plus fréquentes.

“Parfois il y a la volonté de nuire à l’image ou à la réputation de la victime, mais très souvent les points de départ sont une mauvaise blague, l’idée de s’amuser, de se moquer, et souvent on le fait pour gagner en popularité, pour faire partie d’un groupe dans lequel on va se sentir plus fort en s’attaquant à une victime qui est plus faible ou qui va être différente.”

Axelle Desaint, Directrice du pôle éducation au numérique et du programme national “Internet Sans Crainte” chez TRALALERE

Plusieurs signes peuvent indiquer qu’un jeune est victime de cyberharcèlement. Parmi ces signes, on retrouve l’anxiété, la crainte, l’isolement et le repli sur soi, les changements de comportement, d’humeur ou de santé, une faible estime de soi, des retards et absences à répétition, ou encore le rejet des activités numériques. Concernant les auteurs et participants, ils peuvent avoir une attitude agressive ou provocante, une faible empathie et un cercle d’amis agressifs ou qui participent au harcèlement. Généralement, ils ne reconnaissent pas l’impact de leurs actes et utilisent de nombreux comptes en ligne.

Les jeunes âgés de 13 à 15 ans sont particulièrement touchés par le cyberharcèlement, avec une prévalence de 51% chez les filles. En France, les statistiques montrent que 20% des enfants âgés de 6 à 18 ans ont déjà été victimes de cyberharcèlement (Institut Audirep, 2021). Ces chiffres mettent en évidence l’ampleur du problème et la nécessité d’agir pour favoriser un environnement numérique plus sécurisé et bienveillant. 

Se protéger et agir contre le cyberharcèlement

Le cadre juridique

En France, le cyberharcèlement est considéré comme un délit, avec des peines pouvant aller jusqu’à 3 ans d’emprisonnement et 45 000€ d’amende.

La loi française prévoit différentes catégories de cyberviolences, chacune étant traitée spécifiquement. Tout d’abord, la loi du 4 août 2014 réprime le harcèlement et le cyberharcèlement, reconnaissant ainsi leur gravité et leur impact néfaste sur les victimes. Ensuite, la loi du 7 octobre 2016 pour une république numérique a introduit des dispositions relatives au revenge porn (diffusion non consensuelle d’images intimes) et à l’atteinte à l’intimité de la vie privée. Enfin, la loi du 3 août 2018, dite loi Schiappa, a pris en compte le harcèlement de meute, qui implique des actions coordonnées visant à harceler une personne en ligne. Par ailleurs, la loi sur la liberté de la presse du 29 juillet 1881 s’applique également sur Internet, ce qui signifie que les propos interdits par cette loi sont également illégaux en ligne. Ces propos comprennent la diffamation, l’injure raciste, la provocation à la haine, à la discrimination ou à la violence raciste, l’apologie du crime et la contestation des crimes contre l’humanité.

En ayant connaissance de ce cadre juridique, éduquer les jeunes et les parents sur les conséquences légales du cyberharcèlement et les encourager à signaler les incidents favoriseraient la prise de mesures appropriées pour protéger les victimes et à sanctionner les auteurs.

Les bonnes pratiques contre le cyberharcèlement

Jeune fille qui utilise un ordinateur

Dans un premier temps, mettre son compte en privé sur les réseaux sociaux et choisir soigneusement ses contacts en veillant à n’accepter que les demandes d’amis provenant de personnes que l’on connaît personnellement, permettent de limiter l’accès à ses publications aux proches de confiance et ainsi de réduire considérablement les risques d’interactions indésirables avec des inconnus.

Le filtrage de contenus, mots clés ou utilisateurs indésirables, est un outil de blocage proposé par les réseaux sociaux. Néanmoins ces paramétrages peuvent être modifiés automatiquement lors des mises à jour des plateformes, il est donc recommandé de vérifier régulièrement les paramètres de confidentialité et de sécurité pour s’assurer qu’ils correspondent toujours aux préférences personnelles et aux besoins de l’utilisateur.

La protection du compte passe également par la création d’un mot de passe confidentiel et sécurisé. Utiliser une combinaison complexe et éviter de divulguer ce mot de passe à quiconque permet de limiter les risques de piratage ou d’accès non autorisé à ses informations personnelles. De même, privilégier l’utilisation d’avatars ou de pseudonymes plutôt que de révéler son identité réelle peut renforcer la protection de sa vie privée.

Outre ces mesures techniques, il convient de rappeler que la lutte contre le cyberharcèlement ne repose pas uniquement sur des initiatives individuelles, mais aussi sur des actions collectives. Encourager un environnement en ligne respectueux et bienveillant, enseigner le principe juridique de droit à l’image, promouvoir des comportements responsables et signaler les cas de cyberharcèlement aux autorités compétentes sont autant de mesures qui contribuent à créer un internet plus sûr pour tous.

La prévention

Bien que l’anonymat soit offert par Internet, adopter des comportements bienveillants et communiquer de manière courtoise et polie favorise un environnement en ligne plus sain. Face aux provocations, il est conseillé de ne pas répondre, bloquer et signaler le contact car engager une confrontation en ligne ne fait souvent qu’aggraver la situation. 

Dans le cas où le cyberharcèlement survient, il faut agir rapidement et de manière appropriée, car seulement 10% des victimes osent en parler principalement en raison d’un sentiment de culpabilité et de la crainte de voir leur accès aux réseaux sociaux restreint. En tant que parents, éducateurs ou proches, écouter sans jugement, rassurer et accompagner la victime ou le témoin sont des actions clés pour leur permettre de s’exprimer en toute confiance, de les déculpabiliser et de rompre l’isolement qu’ils peuvent ressentir.

Enfin, la lutte contre le cyberharcèlement ne doit pas être menée seul. En informant l’équipe éducative de l’établissement scolaire ou en avisant des professionnels compétents, la victime pourra bénéficier d’un soutien supplémentaire et des mesures appropriées pourront être mises en place.

En parler, se faire aider, avoir des conseils de professionnel·les

Plusieurs initiatives et plateformes ont été mises en place pour accompagner les victimes de cyberharcèlement, les témoins et leurs familles. L’un des principaux dispositifs d’assistance aux victimes est le numéro 3018, disponible via chat, appel téléphonique ou application mobile. Ce numéro national géré par l’association e-enfance permet de signaler anonymement un cas de cyberharcèlement aux équipes spécialisées. En tant que tiers de confiance des réseaux sociaux, le numéro 3018 peut faciliter la suppression de contenu nuisible et offrir un soutien confidentiel aux victimes. Pointdecontact.net permet également de signaler des contenus illicites de manière anonyme. Enfin, la plateforme Faminum constitue une ressource précieuse, mettant à disposition une variété d’outils tels que des vidéos pédagogiques, des kits de sensibilisation et d’apprentissage. Ces ressources gratuites sont destinées aux parents, aux accompagnants ainsi qu’aux enfants harcelés ou harceleurs, offrant ainsi un soutien global pour prévenir et faire face au cyberharcèlement.

A noter que ces ressources ne sont qu’une partie des solutions disponibles. Il existe de nombreuses autres initiatives, organismes et professionnels spécialisés dans la lutte contre le harcèlement en ligne.

Replay webinaire “E-parentalité : les réseaux sociaux et le cyberharcèlement” 

(Re)visionnez notre webinaire “E-parentalité : les réseaux sociaux et le cyberharcèlement” pour en savoir plus sur cette forme de violence et découvrir les conseils avisés d’Axelle Desaint, directrice du pôle éducation au numérique et du programme national “Internet Sans Crainte” chez TRALALERE.

Sources

Liens utiles

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