Le numérique : un puissant levier d’accompagnement pour les jeunes en insertion
En pleine crise sanitaire, les jeunes en insertion sont plus que jamais fragilisés : 1 jeune sur 2 a perdu son emploi pendant le premier confinement, et 70% des jeunes diplômés en recherche d’emploi pensent que la crise a empêché leur entrée dans la vie active.
En matière numérique, si les publics jeunes ont des usages ancrés et quotidiens, ils manquent toutefois de compétences réelles applicables dans un cadre professionnel ou administratif. C’est en cela qu’ils se démarquent des autres publics en situation de précarité numérique, et c’est également pourquoi le numérique représente une opportunité d’innovation et un formidable levier d’engagement pour les jeunes en insertion.
Le rapport des jeunes au numérique : un usage très fort malgré des lacunes certaines
Être né avec internet ne signifie pas être expert du numérique. Contrairement à ce que suggèrent les noms qu’on leur prête, les digital natives [natifs du numérique] et les représentants des générations Y, Z ou Google, peuvent présenter de réelles lacunes dans la maîtrise des compétences numériques. D’après l’INSEE, 1 jeune de 15 à 29 ans sur 5 avait, en 2019, au moins une incapacité numérique, c’est-à-dire un manque de compétence numérique de base (s’informer, communiquer, utiliser des logiciels ou résoudre des problèmes).
Autrement dit, utiliser les réseaux sociaux ou les jeux en ligne ne demandent pas les mêmes compétences que réaliser son CV sur un outil bureautique ou envoyer un mail professionnel. En 2015 et avec l’aide de l’anthropologue Yves-Marie Davenel, l’association Emmaüs Connect a réalisé une étude auprès des professionnels et des jeunes de Mission Locale, faisant état de réalités encore constatées au quotidien par les professionnels accompagnant des jeunes en insertion :
« À l’instar des études menées en France et au niveau international, les données recueillies dans notre enquête mettent en lumière la nécessité de dépasser les préjugés sur la ‘génération internet’ : être un jeune adulte à l’ère d’internet et du smartphone ne signifie en rien être en mesure d’utiliser à bon escient ces outils dans un parcours d’insertion professionnelle, même si ces jeunes sont davantage habitués à un environnement technologique que leurs aînés. »
Extrait de l’étude Les pratiques numériques des jeunes en insertion professionnelle (Emmaüs Connect, 2015)
Des usages numériques pourtant ancrés
Pour autant, ces lacunes ne signifient pas qu’ils soient complètement exclus du numérique. Les usages des jeunes en la matière explosent : d’après le Baromètre du Numérique publié par le CREDOC en 2019, 99% des 18-24 ans se connectaient à internet chaque jour, contre 78% pour le reste de la population. Ces usages se concentrent essentiellement autour du visionnage de vidéos, des jeux en ligne, de la consultation de blogs, et d’applications de messageries instantanées.
Pour naviguer sur internet, le smartphone est leur équipement de référence. Mais si 99% des 18-24 ans en sont équipés, l’accès à une connexion internet sécurisée dépend du contexte socio-économique de ces publics : en 2019, 98% des diplômés du supérieur y avaient accès, contre 54% des non-titulaires du baccalauréat.
Les apports du numérique dans l’accompagnement des jeunes en insertion
En prenant en compte leurs usages quotidiens, le numérique apparaît comme un canal pertinent d’identification, de communication et d’accompagnement des jeunes en insertion.
« Aller vers » grâce au canal numérique
Les publics jeunes font face à de nombreux freins qui les empêchent de franchir la porte d’une structure : isolement géographique et problématique de mobilité, peur d’être étiqueté comme bénéficiaire, manque de lisibilité de l’offre de services disponibles… Selon une étude de la DARES*, plus d’un tiers des jeunes ni en emploi, ni en études, ni en formation ne sont en contact avec aucun service d’accompagnement vers l’emploi. Le repérage de ces publics est donc un enjeu majeur pour l’action sociale.
Le numérique offre à cet égard une opportunité prodigieuse d’aller chercher ces jeunes là où ils se trouvent, en créant un service accessible depuis leur poche, moins engageant, anonyme, et non-stigmatisant. Le canal numérique permet alors de toucher ces « invisibles ».
*Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques.
Enrichir les dispositifs d’accompagnement existants
L’enjeu n’est pas de remplacer les parcours d’accompagnement traditionnels par le numérique, mais plutôt de venir les renforcer en créant des parcours mixtes alliant le présentiel et le distanciel. Début 2020, dans le cadre d’un partenariat avec la DIRECCTE Pays de la Loire, l’Union Régionale des Missions Locales, et trois missions locales (Sarthe Nord, Cholet et Mayenne), WeTechCare a mené une expérimentation de trois mois avec 120 jeunes afin de proposer des temps d’accompagnement à distance, à travers des outils de visioconférence et de chat.
Suite à l’expérimentation, 13 conseillers sur 15 ont déclaré vouloir continuer l’accompagnement à distance. Les échanges ont été de qualité pour 94% des conseillers, constat partagé par les jeunes accompagnés qui, pour 73% d’entre eux, ont aussi apprécié le gain de temps permis par le distanciel.12
« [L’accompagnement à distance] peut vraiment être un plus et un nouvel outil pour répondre aux besoins de certains jeunes. Et je pense qu[‘il] peut être facilitant pour les jeunes qui habitent en milieu rural. »
Conseiller ayant participé à l’expérimentation
Pour en savoir plus sur cette expérimentation, vous pouvez lire l’article « Accompagnement à distance des jeunes via le numérique, le retour des Missions Locales ».
Par ailleurs, comme l’explique la Mission Société Numérique dans son article « Le numérique, vecteur et catalyseur de nouvelles relations entre adolescents et bibliothèques », le numérique peut également renouveler des liens affaiblis entre les jeunes et les structures d’accueil.
Accélérer les capacités d’apprentissage des jeunes
Tout en s’adaptant aux usages des jeunes, utiliser le numérique dans l’accompagnement permet également de favoriser des leviers d’apprentissage tels que la gamification, le micro-learning, etc.
Dans le cas d’accompagnement collectif, les quiz, vidéos, et toute autre ressource numérique et ludique renforcent les leviers de pédagogie active. Le numérique vient décupler l’attention des jeunes et étoffe les manières d’enseigner et d’apprendre.
Le numérique a également bouleversé l’accès à l’information : en amont ou en complément de l’accompagnement, proposer des outils numériques pour un apprentissage en indépendance permet de rendre les publics jeunes plus autonomes dans l’accès à la formation et à l’information.
Les solutions qui utilisent le canal numérique comme levier d’insertion
CLICNJOB, une plateforme pour redonner confiance aux jeunes dans leur insertion professionnelle
Première plateforme lancée par l’association WeTechCare, CLICNJOB est une solution inspirée des plateformes de jeux et co-construite avec les acteurs spécialisés dans l’insertion des jeunes. Via la mise en ligne de nombreuses ressources pédagogiques (essentiellement des quiz et des vidéos), elle permet aux jeunes de comprendre les codes de l’emploi et dédramatise le monde du travail.
Utilisée également par les professionnels des structures d’insertion, CLICNJOB offre des ressources interactives pour animer des ateliers dynamiques sur la recherche d’emploi, proposer une première offre d’accompagnement dans des espaces numériques en libre accès, et optimiser la création de CV à l’aide d’un générateur de CV adapté à un public utilisant le numérique mais ne maîtrisant pas les outils bureautiques.
« Clicnjob est le site web qui donne du pouvoir d’agir aux jeunes dans leur parcours d’insertion professionnelle. Les jeux sont très pédagogiques, les apprenants sont très contents. »
Olivier Jastrzab, directeur adjoint de la mission locale de Lille
Le Déclic, une plateforme de mentorat en ligne pour renforcer l’employabilité des jeunes
Le projet Le Déclic, lui aussi développé par WeTechCare, met en relation des salariés engagés et des jeunes en insertion. L’accompagnement proposé par ces salariés permet d’aider les jeunes dans des problématiques clés de l’insertion professionnelle, à l’instar du CV ou de l’entretien d’embauche.
À travers les réseaux sociaux, Le Déclic est capable de repérer et d’engager les jeunes en besoin d’aide, afin de (re)nouer un dialogue avec eux, et de leur apporter un premier niveau de soutien. Le service est adapté aux pratiques numériques des jeunes, accessible depuis leurs applications de messagerie instantanée et, du côté des professionnels, le levier digital offre une réelle flexibilité d’engagement.
« Je tiens à te remercier, c’est vraiment gentil de ta part de m’aider. Je me sens souvent seule et j’essaie de faire de mon mieux pour mon CV, mais c’est vrai qu’un avis extérieur aide souvent ! Merci, merci, merci ! »
Yolie, jeune accompagnée avec Le Déclic
Identifier et valoriser les compétences douces des jeunes en insertion avec Jobready
Développé par l’association Article 1, Jobready est un parcours d’identification, de valorisation et de développement des soft skills [compétences transversales] des publics jeunes. D’après son manifeste, ces compétences transversales représentent « la nouvelle frontière de l’égalité des chances ». Il ne s’agit plus seulement de développer des compétences techniques puisque « d’autres aptitudes se révèlent cruciales, telles que la capacité à apprendre, à travailler en équipe, à optimiser son temps ». Les équipes de Jobready ont ainsi créé un référentiel de 45 compétences transversales clés, réparties dans 11 catégories.
Vous souhaitez découvrir d’autres solutions numériques pour accompagner les jeunes en insertion ? La boîte à outils de La France Une Chance peut vous être utile.
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