Hygiène et numérique : à Paris, l’accueil de jour multiservices de la Croix-Rouge française
Le 3 juillet 2019, la Croix-Rouge française à Paris inaugurait sa première laverie solidaire, rue d’Aboukir, dans le deuxième arrondissement de Paris. Chaque samedi, les usagers – des étudiants, des personnes en situation de rue ou des familles en difficulté – peuvent y déposer leur linge et le récupérer, propre et sec, quelques heures plus tard.
En plus des trois machines à laver et des trois sèche-linges, celles et ceux qui s’y rendent peuvent également profiter de deux ordinateurs en libre accès. « Si l’idée d’une laverie s’est imposée assez naturellement, je suis contente de voir qu’elle se transforme en un lieu de vie », témoigne Marie-Sophie Dubarry, une des bénévoles à l’origine du projet.
« On peut y passer ou rester prendre un café, discuter, … poursuit-elle. C’est aussi pour ça qu’on a installé ces ordinateurs en septembre 2020 – et qu’on a mis l’électroménager dans une pièce à part ». La laverie des débuts s’est transformée en un accueil de jour multiservices.
« Entre un point d’accès numérique et une permanence connectée »
C’est à 9h30 que la dizaine de bénévoles présents ouvre les portes de l’accueil de jour. La première heure est réservée à la réception du linge et aux premiers cycles de lavage, et les deux ordinateurs sont mis à disposition à partir de 10h30 jusqu’à la fermeture.
Si certains s’en servent en autonomie, comme Aissatou qui est venue « passer le temps en faisant des mots fléchés », les autres peuvent compter sur l’aide des bénévoles présents. Marie Khawam, par exemple, est bénévole pour la Croix-Rouge française depuis janvier 2021. Après s’être dédiée à la partie laverie de l’accueil de jour et aux maraudes, elle accompagne désormais sur le numérique « pour apporter quelque chose en plus ».
« Le niveau d’autonomie est très variable, mais j’essaie de ne pas toucher la souris et de ne pas faire pour eux », concède-t-elle. Une partie de son accompagnement se centre sur l’accès aux droits, notamment grâce à la plateforme Toutes Mes Aides. Une vingtaine de personnes passées par l’accueil de jour ont par exemple découvert qu’elles avaient droit à un Pass Navigo (nom donné à la carte de transports en Île-de-France) gratuit. Il s’agit ensuite de les guider dans la démarche.
Autre exemple, « une des personnes qui est venue ici ne s’était pas connectée pendant longtemps à sa boîte mail, se rappelle la bénévole. Il y avait plusieurs milliers de messages non lus, et il a voulu abandonner. Je lui ai dit que nous allions prendre le temps : il est venu deux semaines de suite, et nous avons fait le tri. Il s’est également désabonné de tous les mails publicitaires ».
D’autres encore viennent à l’accueil de jour pour faire un CV ou une lettre de motivation. L’imprimante et le scanner mis à disposition permettent également de conserver des documents ou de les photocopier… « Il s’agit de respecter les personnes et de les accompagner en fonction de leurs besoins, explique Edouard Wolf, le directeur local adjoint de l’action sociale. C’est aussi pour ça que je dis souvent que nous nous situons entre le point d’accès numérique et la permanence connectée ».
Depuis peu, cette unité locale de la Croix-Rouge française utilise le coffre-fort numérique développé par Reconnect, une association du Groupe SOS. Cet outil de stockage connecté permet de conserver ses papiers de manière sécurisée et de les partager, en totalité ou en partie, avec les professionnels de l’action sociale.
S’il est trop tôt pour en tirer un bilan, Edouard Wolf précise qu’un des avantages de Reconnect, « c’est qu’il n’y a pas besoin de mail : il suffit d’un nom d’utilisateur et d’un mot de passe. En cas d’oubli du mot de passe, une question de sécurité permet de le rétablir ». Il est également possible d’y stocker des contacts et des notes.
Communication par et pour le numérique
« Je dis souvent aux personnes qui se rendent à la laverie qu’elles peuvent se servir des ordinateurs, souligne Marie Khawam. Il s’agit de leur dire que cet outil existe, et qu’elles peuvent l’utiliser pour consulter leurs mails ou pour faire des recherches… Généralement, ils me répondent qu’ils n’en ont pas envie mais, quand ils reviennent quelques semaines après, ils essaient ! ».
Un enjeu de communication, donc, mais également de régularité. Environ 20 bénévoles se rendent régulièrement à l’accueil de jour, et une dizaine est nécessaire pour pouvoir en assurer le service. Si les vagues de confinement ont entraîné la fermeture temporaire du local, il s’agit aujourd’hui d’assurer un roulement efficace des équipes pour maintenir des horaires d’ouverture réguliers.
Pour éviter des déplacements inutiles, les bénévoles impliqués mettent constamment à jour les horaires d’ouverture sur Soliguide. « Nous avons constaté que nos publics l’utilisaient, commente Edouard Wolf. En mettant à disposition l’information en temps réel, ça évite qu’ils se déplacent pour rien. C’était d’ailleurs pour cette raison que nous ne souhaitions pas figurer dans le guide papier de la mairie ».
« Certaines personnes n’utilisent pas les ordinateurs, mais je les aide pour l’utilisation de leurs smartphones par exemple : comment aller sur YouTube, comment activer le plein écran, comment ajouter un contact, … »
Marie Khawam
« Un pas en plus »
A l’entrée, sur des étagères chargées, figure une recette de lessive artisanale à base de savon, de bicarbonate et de cristaux de soude. Le rappel d’un projet d’ateliers collectifs, à destination des personnes accompagnées autant que des riverains, pour apprendre à faire soi-même ses produits d’hygiène (lessive, déodorant, dentifrice…).
Si la pandémie a mis à mal ces ateliers, Edouard Wolf précise qu’ils s’inscrivaient dans une démarche plus large : « nous savons bien que les personnes que nous aidons sont également celles qui sont le plus exposées au dérèglement climatique et aux pollutions. C’est pour ça que nous faisons un pas en plus dans nos actions : nous faisons nous-mêmes la lessive, nous avons mis des heures à choisir les machines à laver, et le reste du mobilier (ndlr : hormis les bacs en plastique), c’est de la récupération. Nous avons également choisi nos fournisseurs selon ces critères, du café qui vient d’une boutique du quartier au savon de Marseille que nous achetons en barre auprès d’un producteur marseillais ».
Une attention particulière est également portée au respect des données personnelles. L’utilisation de sessions invités ou le choix, parmi d’autres coffres-forts numériques, de Reconnect sont pour Edouard Wolf autant de gageures de la confidentialité de cet espace.
Le modèle de la rue d’Aboukir semble à présent s’essaimer et un projet similaire, mené cette fois par des salariés de l’association, se développerait à Trappes. Pour la branche des deux premiers arrondissements de Paris, le futur serait plutôt aux ateliers numériques : « nous venons de récupérer un autre local, près d’ici, où nous aurions assez de place pour faire des ateliers numériques. On y réfléchit encore », détaille Edouard Wolf.
Liens utiles :
- La fiche Soliguide de l’accueil de jour multiservices
- Pour contacter la structure (questions sur le fonctionnement, bénévolat…) : acc-laverie.paris01@croix-rouge.fr
Bravo pour votre équipe dynamique, votre soutien, votre écoute et votre réconfort.
Bon courage à vous
Bien sincèrement
Martine