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Comment développer une offre d’inclusion numérique en itinérance ?

Dans le cadre d’un accompagnement auprès du Département de Saône-et-Loire, WeTechCare – l’association derrière Les Bons Clics – s’est penchée sur le thème de la formation numérique en itinérance.

C’est ainsi en mai dernier qu’a été inauguré le Van 71, un bus numérique qui sillonne désormais les communes rurales du département. Ce type d’accompagnement n’est pas unique en France et, pour le définir au mieux, les équipes de WeTechCare ont donc interrogé les responsables de huit projets d’inclusion numérique itinérants.

Le média Les Bons Clics livre ici une synthèse de ces recherches et de ces échanges : comment et pourquoi développer un projet d’inclusion numérique en itinérance ? Quelles sont les étapes à suivre pour le mettre en place ?

Formation au numérique en itinérance : le DigiTruck de WeTechCare, Close The Gap et Huawei sillonne l'Île-de-France pour accompagner tous ceux et toutes celles qui le souhaitent vers le numérique.
Depuis le 28 février 2022, le DigiTruck sillonne l’Île-de-France pour former au numérique celles et ceux qui le souhaitent, au plus près de leur domicile – ©Nicolas Catard / Uptown

Qu’est-ce qu’une offre d’inclusion numérique en itinérance?

Une offre d’inclusion numérique en itinérance s’appuie sur une unité mobile de médiateurs ou d’aidants numériques, sillonnant un territoire grâce à un véhicule qui permet de transporter du matériel informatique. Les accompagnements peuvent être proposés dans les locaux de partenaires, en extérieur ou bien au sein du véhicule si celui-ci est suffisamment grand pour l’accueil du public.

Au même titre que les espaces publics numériques (EPN), les bus numériques sont des incarnations physiques de l’inclusion numérique sur un territoire. L’itinérance d’une équipe de médiateurs numériques répond à un enjeu d’équité d’accès aux services numériques en touchant des zones dépourvues d’offre d’une part, et en allant au plus près des publics les moins mobiles et/ou les plus éloignés du numérique d’autre part.

Les bus numériques peuvent ainsi intervenir en zone rurale, dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, ou encore en zone urbaine lorsque l’offre d’accompagnement n’y est pas suffisante.

Si l’accompagnement proposé dans un bus numérique peut varier, on retrouve souvent des permanences connectées pour des demandes individuelles ou des déblocages rapides, des ateliers numériques collectifs, de l’assistance dans la réalisation de démarches administratives en ligne, ou encore des actions de sensibilisation et de découverte du numérique de manière ludique.

Un bus numérique géré par l’association Boîte aux Lettres circule dans l’Orne (61) et propose des cycles d’ateliers sur 12 séances dans les locaux des partenaires qui les sollicitent après avoir constitué des groupes de participants. Les formations durent deux heures et portent sur des thématiques telles que les compétences de base, la sécurité en ligne, l’utilisation d’une messagerie…

Pour animer ces formations, un binôme de salariés de l’association se déplace en bus avec le matériel. « Nous accompagnons principalement des groupes de 6 à 7 retraités, témoigne l’un d’eux, et nous constatons très peu de déperdition entre les séances. Même si nous ne réalisons pas les accompagnements directement dans le bus, il nous sert d’enseigne publicitaire et c’est un outil de sensibilisation ».

Les enjeux de l’accompagnement numérique en itinérance

Pour lancer une offre itinérante d’inclusion numérique et faciliter son déploiement sur le territoire, il est important de cadrer toutes les dimensions du projet : les services à proposer, l’itinéraire, les partenariats, la communication, ainsi que les aspects logistiques et organisationnels.

Répondre aux besoins des publics et de son territoire

Les besoins des publics vont définir le périmètre de votre action. Pour y répondre au mieux, vous pouvez interroger directement les habitants de votre territoire, en allant à leur rencontre, en organisant une concertation ou encore en interrogeant les agents de proximité au contact des habitants :

  • Quels sont les publics les plus en difficulté sur le numérique ?
  • Quelles sont leurs difficultés au quotidien avec le numérique ?
  • Savent-ils vers qui se tourner lorsqu’ils rencontrent des difficultés avec des outils ou services numériques ?
  • Quels accompagnements pourraient les intéresser ?

Le bus France Services de Saint-Quentin a par exemple envoyé aux habitants un questionnaire pour savoir où ils aimeraient voir le bus numérique stationner, ce qui a permis simultanément de les impliquer et de les informer du projet.

Pour vous assurer que les accompagnements proposés soient complémentaires de l’offre existante, il est aussi recommandé d’évaluer l’offre des acteurs locaux. Il s’agit notamment d’identifier :

  • Quelles sont les communes qui ne disposent pas de permanences numériques ?
  • Quelles sont celles qui disposent d’ateliers numériques ? Quelles sont les thématiques et/ou les compétences couvertes par ces ateliers ?
  • Quels sont les événements locaux pertinents auxquels vous pourriez participer pour faire des actions de sensibilisation (marchés, foire …) ?
Cadrer un projet

Aux côtés des ressources pédagogiques, des événements et des articles, Les Bons Clics propose également des parcours informatifs aux personnes impliquées dans la médiation numérique. L'un d'eux porte sur la création d'espaces numériques en libre accès, avec différentes ressources dédiées au cadrage d'un projet. 

Une fois votre offre de services définie, vous allez pouvoir acter de l’itinéraire du bus. Plusieurs règles d’or sont à garder en tête :

  • La récurrence des passages : les habitants d’une commune desservie régulièrement identifient plus facilement votre projet comme une ressource éventuelle. Cela facilite la venue spontanée des publics mais aussi l’orientation des publics par des agents de proximité ;
  • La lisibilité de l’itinéraire : définissez votre parcours en avance – sur une base trimestrielle par exemple – pour faciliter l’organisation des équipes de médiateurs et le travail de communication ;
  • Sa visibilité : toujours dans l’objectif de se faire connaître du public, communiquez clairement sur vos passages avec des flyers, des affiches, ou sur internet auprès de vos partenaires et des habitants ;
  • La pertinence des horaires et des jours de passage : définissez votre planning de passage en adéquation avec les disponibilités des publics que vous ciblez – par exemple en décalant vos semaines du mardi au samedi ou en prenant en compte le calendrier scolaire.

Naturellement, l’itinéraire n’est pas immuable. Comme l’explique la directrice d’une association qui porte une offre itinérante, « un début d’action n’est jamais parfait, l’important c’est d’être capable d’ajuster le projet : ce sera nécessaire au bout d’un moment. Il faut quelqu’un qui pilote et qui peut faire évoluer le projet au fil du temps. Une action est pertinente si elle répond aux besoins des habitants ».

Communiquer auprès du public

« Le principal problème de la médiation numérique, ce n’est pas le contenu, c’est de trouver le public », commente le médiateur d’un bus numérique dans le Cantal. Bien communiquer est indispensable au bon déploiement de votre projet, notamment si vous intervenez dans plusieurs communes.

Un premier enjeu est d’informer clairement les publics ciblés de la nature des services proposés, ainsi que des lieux et dates d’intervention. Il peut être utile pour cela de s’appuyer sur des flyers et des affiches dont le lieu et les horaires d’accueil sont modifiables simplement.

De plus, nombre d’acteurs que nous avons rencontrés utilisent des canaux de communication numériques en complément des supports papiers. La communication en ligne peut être utile pour cibler les proches des personnes en fragilité numérique et les structures qui orientent du public. C’est par exemple ce qu’a fait le Département du Cantal en mettant en ligne une cartographie de l’itinéraire de son bus numérique.

Il s’agit également d’impliquer les acteurs locaux qui agissent au plus près des habitants pour qu’ils relaient la communication et orientent le public vers l’offre. Pour faciliter ce travail de relais, le Département de Saône-et-Loire a créé un kit de communication clé-en-main pour les communes qui accueillent le bus. Ce kit comprend des affiches, des flyers, mais aussi des éléments de langage pour la communication en ligne et un support de présentation du projet.

L’apparence du bus, de par son itinérance, constitue en elle-même une enseigne publicitaire et un moyen efficace de se faire connaître des publics en situation de fragilité numérique. Il est donc recommandé de floquer le bus pour rendre l’offre plus visible. En plus de ses couleurs vives, l’e-bus de Concarneau Cornouaille Agglomération indique clairement sur la carrosserie « ateliers d’accompagnement gratuits pour tous » et « Initiation aux outils et aux usages numériques, accompagnement aux démarches en ligne ».

Concept Luoga

En décembre dernier, le média Les Bons Clics rencontrait Thérèse Bérard, la fondatrice de Concept Luoga, l'association derrière les Guitounes : « [Les Guitounes] ne sont pas des camions, détaillait-elle alors. On considère qu’avec un camion, on reconstruit les murs. Tous nos dispositifs sont ouverts, et leur arrivée doit être synonyme de fête. Ils sont colorés, s’ouvrent, comme un origami ». L'entretien est à retrouver ici.

Engager des partenaires locaux dans le déploiement

Tisser des partenariats avec des structures locales sur vos territoires d’intervention est essentiel à la réussite de votre projet. Les acteurs locaux peuvent en effet être des soutiens précieux sur la logistique et l’orientation des publics. Les collectivités, les opérateurs de services essentiels, ou les associations peuvent apporter un soutien financier, matériel, et/ou opérationnel au projet.

Cette démarche peut être initiée dès les prémisses du projet. Vous pouvez notamment organiser des réunions d’information avec plusieurs interlocuteurs identifiés ou bien des rencontres bilatérales.

Avoir un support de présentation de votre offre de services peut à cet égard être utile lorsque vous engagez des conversations avec de potentiels partenaires, pour qu’ils puissent le garder en mémoire mais aussi le communiquer auprès de leurs collègues et de leurs publics.

L’implication des communes peut s’avérer particulièrement décisive. D’une part, car elles peuvent vous donner des droits d’installation en extérieur ou des accès à des salles de la commune, d’autre part car elles peuvent vous mettre en relation avec d’autres partenaires locaux (centres sociaux, médiathèques…).

Pour bien ancrer le projet dans un territoire, les relations partenariales doivent s’inscrire dans le long terme. C’est une dynamique à l’échelle locale qu’il faut nourrir en communiquant régulièrement avec vos interlocuteurs, voire en organisant des rencontres collectives afin d’animer cette communauté autour de votre projet.

L’équipe de médiateurs au cœur de votre projet

Une solution de formation en itinérance sera avant tout déterminée et incarnée par son équipe de médiateurs et médiatrices numériques. Du côté pratique, au moins un membre de l’équipe doit être en capacité de conduire le véhicule (certains bus nécessitent par exemple un permis poids lourds). Ce sont ces équipes qui feront évoluer le projet sur la base de leurs échanges avec les personnes accompagnées.


Liens utiles :

  • Rencontre avec Christophe Boiteaux, co-fondateur de Destination Multimédia ;
  • Rencontre avec Thérèse Bérard, fondatrice de Concept Luoga ;
  • Reportage au DigiTruck, lors de son premier arrêt dans le 17ème arrondissement de Paris.

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